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Un été avec Jankélévitch

Un été avec Jankélévitch, un livre ou plutôt un éloge écrit par Cynthia Fleury, publié aux éditions des https://editionsdesequateurs.fr/

L’autrice est philosophe, psychanalyste, également professeure titulaire de la chaire Humanités et Santé au Conservatoire national des arts et métiers.

C’est avec une saison de retard que je partage aujourd’hui avec vous cette plume brillante dont j’avais déjà présenté le travail à l’occasion de la sortie de son ouvrage de 2020 “Ci-gît l’amer, Guérir du ressentiment”.

A travers cet essai, elle nous fait partager de manière limpide sa passion pour Vladimir Jankélévitch (1903-1985), philosophe connu essentiellement pour sa métaphysique du « je ne sais quoi » et du « presque rien ».

Jankélévitch, philosophe du 20ème siècle qui travaillait directement pour le 21ème comme il le disait lui-même, car très peu lu par ses compatriotes de l’époque.

C’est avant tout le penseur qui nous invite à passer à l’action, à vivre dans l’ici et maintenant en ayant le courage et le sérieux de dépasser la désespérance et le pessimisme. 

Il nous met également en garde contre les conformismes de la pensée.

En effet, il s’oppose catégoriquement aux mouvements idéologiques et autres « isme » : catholicisme, marxisme, existentialisme, etc…

« De tous les conformismes, le conformisme du non-conformisme est le plus hypocrite et le plus répandu aujourd’hui. »

Le je ne sais quoi

Pour contrer ce réductionnisme, il théorise alors une philosophie du je-ne-sais-quoi et du presque rien. 

Son but est ici de destituer la fausse grandeur des dogmes, des idéologies et du totalitarisme.

Cette formule particulière du je ne sais quoi a été choisie par Jankélévitch car selon lui, il est impossible d’être plus précis, de le fixer à tel ou tel endroit ou de lui donner une couleur définitive. 

Le je ne sais quoi c’est  en quelque sorte ce qui échappe à la causalité linéaire et au raisonnement classique.

Ce n’est pas seulement une émotion, mais une émotion de la conscience aiguë des choses, que l’on ne peut définir par des mots précis.

“On peut, après tout, résume Jankélévitch, vivre sans le je-ne-sais-quoi, comme on peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien.”

La philosophie fait partie selon lui de ces inutilités essentielles, de ces refus obstinés de l’instrumentalisation. Un passage de Cynthia Fleury m’a d’ailleurs profondément marqué à ce sujet : 

“Dans ce monde, tout sert à quelque chose, plus personne n’ose affirmer sa seule présence, et pourtant la philosophie partage avec la notion de dignité le fait de ne pas servir à, et précisément par ce geste de non négociation avec l’utilitarisme de préserver le sens de ce qui est réellement utile à l’homme, à savoir sa raison d’être.” 

Il réaffirme plus que jamais sa conscience de la fragilité constante des choses. Pour lui, nous nous devons d’exercer chaque jour la morale, car rien n’est figé. C’est « l’infatigable recommencement de chaque printemps, de chaque aurore, de chaque floraison. »

« Ne ratez pas votre unique matinée de printemps » cette célèbre phrase condense une bonne partie de la philosophie du philosophe.

D’abord avec l’impératif catégorique, de ne pas rater. Puis la notion d’irréversibilité, le kairos, l’art de saisir l’occasion.

Enfin le printemps, comme symbole du mouvement, du commencement, l’énergie vitale qu’il partage avec le philosophe Bergson.

Ethique et courage

Jankélévitch est aussi le philosophe de l’éthique et du courage

Le courage représente la vertu cardinale de l’auteur, qu’il n’a cessé d’incarner lui-même dans ses actes et ses engagements. 

Sans le courage, pas de sujet, il n’y a qu’un “on”, une modalité anonyme de soi-même et qui échappe à toute forme de responsabilité.

Le courage pour Jankélévitch, c’est un mouvement de tous les instants, il ne se conjugue pas au passé. Courageux, on ne peut que l’être séance tenante et ensuite retourner à sa modestie et sa vigilance. Avoir été courageux n’est pas chose rentable et ne donne droit à rien, ou plutôt à ce presque-rien, le sujet si intangible et précieux, et qui sans le courage disparaît inéluctablement. 

Sylvain Gammacurta

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