Sylvain Gammacurta Hypnose
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Liberté vs sécurité

En plein coeur du contexte actuel, la sempiternelle bataille entre sécurité et liberté, les deux sœurs ennemies, fait de nouveau rage.

Pourtant, pour ces valeurs fondatrices de la vie en société, la confrontation n’est pas nouvelle. Déjà, à l’orée du 17e siècle, le philosophe anglais Thomas Hobbes, pose les termes du contrat social qui lie les citoyens et l’État.

On concédra donc l’acceptation de contraintes hiérarchiques, en contrepartie de la sécurité, l’une et l’autre valeur étant en corrélation, interdépendantes.

Son compatriote John Locke, quelques décennies plus tard, redefinira les termes du contrat en faveur de la liberté et trace les contours de l’État de droit qui prévaut encore aujourd’hui.

Aujourd’hui les « états d’urgence » décrétés face aux menaces terroristes ou sanitaires viennent sensiblement empiéter sur nos libertés.

Pour autant, ces prises de décisions directives sont-elles justifiées ?

Définitions des termes

Avant toute chose, il me parait primordial de définir ces termes pour bien saisir leurs différents enjeux en société.

La définition de la liberté selon Hobbes : « Le mot liberté désigne proprement l’absence d’opposition (par opposition, j’entends les obstacles extérieurs au mouvement) […] D’après le sens propre (et généralement admis) du mot, un homme libre est celui qui, s’agissant de choses que sa force ou son intelligence lui permettent de faire, n’est pas empêché de faire celles qu’il a la volonté de faire ».

La liberté est une capacité à atteindre notre puissance d’être ou d’action, sans pour autant en être prisonnier ou pré-déterminé.

Être libre c’est de ce fait, accomplir ce que notre désir nous suggère, et non ce que l’on nous impose.

Locke, plus tard estimera à tord ou à raison, que rien ne justifie « le pessimisme radical qui conduit à enfermer les sociétés dans un corset de fer ».

Cependant, il estime qu’il faut « faire confiance à la liberté humaine mais sans candeur excessive ». Ce qui veut dire la laisser à sa spontanéité créatrice dans les limites du « raisonnable », donc avec un certain contrôle.

En ce qui concerne la sécurité, prenons la définition simple par l’absence de danger, c’est-à-dire une situation dans laquelle quelqu’un (ou quelque chose) n’est pas exposé (un minima) à des évènements critiques ou à des risques (défaillance, accident, détérioration, agression physique, vol..).

Sécurité et liberté : Opposition et complémentarité

Depuis les années révolutionnaires, il existe une tension sensible, donnant naissance à une prolifération de revendications libertaires en opposition au gouvernement.

Paradoxalement, la foule reproche souvent à l’État, tel un enfant avec ses parents, de ne pas prendre « les bonnes mesures” ou de ne pas assez lui « venir en aide ».

Il existe une dichotomie incroyable entre nos attentes d’une hiérarchie presque autoritaire et notre aspiration profonde à la liberté individuelle, héritée des Lumières… Des auteurs comme Tocqueville, ou plus récemment C. Fleury en parlent d’ailleurs très bien.

Pour l’individu faisant de sa liberté individuelle une priorité, rien n’est sacré sauf sa jouissance immédiate. « Il n’est donc pas contre la loi, mais contre les lois particulières qui le brident. »

En ce sens, l’individu plébiscite la loi, l’État, la sécurité, les avantages, tout autant qu’il les vilipendes et manifeste une curieuse complaisances face à cette attitude paradoxale.

« Il veut pouvoir tout faire, sans que ce tout lui coûte quoi que ce soit« . Eugène Enriquez

Pour mieux y réfléchir, il est à mon sens nécessaire de ne pas restreindre la valeur de liberté de façon dualiste, autrement dit être libre VS ne pas être libre.

D’un côté, la liberté introduit dans la vie sociale un indéterminisme des individus ou des groupes d’individus créant un espace de « désordre » aussi créateur que perturbateur.

De l’autre, la sécurité implique de la prévisibilité et donc une réduction de la part d’incertitude dans les comportements individuels et collectifs.

Savoir si je peux raisonnablement sortir de chez moi sans m’exposer à des agressions verbales ou physiques.

Savoir de quoi le lendemain sera fait, pour chacun, du point de vue des moyens d’existence, relève dans les deux cas du champ de la sécurité. Ce qui veut dire que le développement des garanties de liberté s’accompagne nécessairement d’une intensification des contraintes pour ceux qui me doivent ces garanties.

Le trop plein de sécurité réduirait donc manifestement la liberté, ainsi qu’une liberté totale dissoudrait la sécurité et de ce fait altérerait la liberté de certains individus.

La fable « le loup et le chien » de Jean de la Fontaine avait soulevé le problème de manière ludique.

D’un côté un chien qui dans le confort, ne manque de rien niveau matériel, mais est en laisse et soumis à la volonté de l’homme. De l’autre le loup qui passe son temps à fuir, vivre dans la peur, la peau sur les os mais est libre.

La morale de la fable tend souvent à interpréter qu‘il est préférable d’être pauvre, affamé et libre que riche, bien nourri mais esclave. Néanmoins, le loup qui préféra sa liberté à la sécurité n’était clairement pas totalement libre : il passait ses journées à chercher de la nourriture (et se mettait en danger pour ça, et risquait de mourir de faim, et souffrait). En d’autres termes il était contraint, par son manque de sécurité, à faire des choses spécifiques…Il y a de nombreux cas où le manque de sécurité crée directement une restriction de liberté, à commencer par tout ce qui nous met en danger.

Si des minorités érigent la liberté comme une valeur absolue, et sous ce couvert estiment être en droit de faire ce qu’elles veulent, la sécurité n’existe plus et cela ne peut qu’encourager, a terme, une tendance à l’auto-défense et une éventuelle guerre civile. Pour autant, la fin de l’état est-elle véritablement la liberté ? (Spinoza)

Manipulation en faveur de la sécurité VS manipulation en faveur de la liberté

Aujourd’hui, dans ce contexte de crise sanitaire, nombre de personnes s’indignent vis-à-vis de la restriction de nos libertés individuelles, à tord ou à raison, là n’est pas le sujet. L’état utilise des arguments, des lois, des décisions allant dans un contexte se voulant garant de la sécurité « générale ». Il est totalement logique de ce fait qu’une opposition s’élève en faveur de la liberté. Chacun des deux acteurs cherchant à faire adhérer ses propres idées au plus grand nombre.

La manière dont les médias traitent la question de l’épidémie est réductrice, l’attitude des pouvoirs publics est discutable et il n’est effectivement pas impossible que cette histoire sucite des « magouilles » orchestrées par la multitudes de protagonistes tentant de gerer d’une façon ou d’une autres la problématique (conflits d’intérêts).

Cf : https://gammacoachinghypnose.com/analyse-psychologique-des-croyances-diffusees-sur-les-reseaux-sociaux

Pour ce faire des « techniques de manipulations » (que je ne juge ni de façon positive ou négative, un ostéopathe peut vous manipuler pour votre bien au même titre qu’un hypnotiseur) sont employés dans les deux « camps » afin d’influencer nos jugements et prises de décision. Lesquels sont soumis à un grand nombre de biais cognitifs.

Par exemple, nous accordons une valeur supérieure à un objet que nous possédons par rapport à celle que nous lui accorderions s’il ne nous appartenait pas : je ne serais prêt qu’à débourser 50 euros tout au plus pour cette place de concert, mais si je l’ai acquise et que vous voulez me l’acheter, j’en réclamerais au minimum 60, 70 ou 100 euros. Nous avons tendance à préférer le statu quo , autrement dit ce que nous possédons, nos situations connues, notre façon de faire et nos avis à ceux des autres.

À quoi devons-nous ces biais cognitifs ? À un certain nombre d’heuristiques, autrement dit des méthodes de prise de jugement rapides et intuitives.

Ces jugements sont essentiels à notre survie mais ne garantissent pas opinion « juste » si elle n’utilise pas un raisonnement dialogique et dialectique … Si nous prenons nos opinions pour argent comptant, c’est souvent parce qu’elles sont basées sur des préjugés.

Préjugés qui (si ils ne sont pas bouleversés) restent à l’origine d’opinions hâtives et préconçues, souvent imposée par le milieu, l’époque, l’éducation, ou due à la généralisation d’une expérience personnelle ou d’un cas particulier.

Exemple de discours utilisant à outrance préjugés et biais cognitifs :

Bonjour à tous, je m’appel X et je suis spécialiste en XXX, agrégé de l’école XXX. Vous en avez marre que l’on vous prive de votre droit à travailler, d’être contrôlé, pris pour des cons par cette politique incohérente, j’ai reçu un message d’un médecin en réanimation qui m’a affirmé que les hôpitaux étaient loin d’être pleins et on vous prive de vos libertés pour cela… Pensez à toutes ces fois où vous avez ressenti de l’injustice, de l’impuissance, ou vous avez été contraints d‘accepter l’inacceptable pour vous et vos enfants… Aujourd’hui on vous prive de vos amis, de votre famille, de votre liberté si durement gagnée par vos ancêtres... Et demain qu’est ce que ce sera, quel monde allez vous laissez à vos enfants ? Qu’allons nous devenir, si vous vous laissez faire, si vous restez obéissant comme tous ces Français conformistes et endormis.Vous ne pouvez pas croire au gouvernement, aux médias…Réveillez-vous ! Eveillez-vous, soyez un lion pas un mouton.

Intuitivement, comment ne pas adhérer en partie ou totalement à ce message, orchestrant une argumentation destinée à activer une indignation inhérente (je pense) à tout être humain normalement constitué, face aux privations de libertés et à un contexte de peur.

Ma volonté n’est pas ici de dégrader le message de fond voulant être passé ici, ni de juger son potentiel émetteur.

Pourtant ici, on retrouve également des astuces bien connues pour toutes personnes s’intéressant aux techniques de communication.

Dans cette version précise, il s’agit de faire valider collectivement le fait que le modèle actuel ne fonctionne pas, non pas dans l’optique de proposer quelque chose de mieux mais dans celle de destituer ce qui ne marche pas et de l’edifier comme l’objet de haine.

Ethos, logos et pathos

Aristote, dans l’art de la rhétorique formalisait déjà les composantes de la communication réussie, sous trois formes :

  • L’éthos, c’est le caractère. C’est l’attribut du locuteur qui s’exprime, ce qu’il représente pour vous : ses qualités, les valeurs qu’ils semblent représenter et son statut.

Dans la rhétorique, Ethos correspond à ce que renvoi le locuteur à ceux qui l’écoutent. Il s’agit de la crédibilité. Dans l’exemple ci dessus, une preuve sociale s’installe dans l’esprit car Mr X se présente comme un spécialiste agrégé, ce qui donne une base notable , une preuve sociale et respectable à son discours, un argument d’autorité. De plus il semble défendre une valeur universelle, la notion de liberté, intuitivement chère à tous et qui touche assurément les foules. Pour finir il appuie ses propos par l’exemple d’un médecin en réanimation qui ne peut pas être (ou difficilement) contredit.

  • Le logos est la logique de ce que le locuteur veut exprimer, le fond du discours. Ce sont les arguments, les idées que l’on propose aux autres. Le contenu du message que l’on veut faire passer.

Tout cela est ensuite appuyé par une argumentation se voulant logique, rationnelle, sur un ton de paternalisme libertarien qui parait ne rien obliger alors qu’il est bourré d’injonctions. Certaines techniques comme celle bien connue du « yes-set » sont utilisées. C’est-à-dire que l’on utilise des truismes, des évidences du genre « vous en avez marre d’être privés, pris pour des cons… » A laquelle on ne peut répondre que oui, suivi d’autres arguments plus discutables ( presupposant un principe manichéen réducteur de ce qui est bien vs ce qui est mal) mais qui par par effet de concaténation, vont augmenter la probabilité d’adhésion.

C’est ce que l’on appel communement le principe d’inference, ou plus vulgairement du « pied dans la porte, une opération logique par laquelle on admet une proposition en vertu de sa liaison avec d’autres propositions déjà tenues pour vraies.

  • Enfin, le pathos est la sensibilité et l’émotion dégagée par le discours. Persuader sur le vif, s’avère souvent plus simple en mobilisant, au-delà de nos pensées rationnelles, nos facultés émotionnelles. Ici le but, outre le fait de jouer le facteur liberté, connu pour rapidement indigner les peuples démocratiques, le locuteur active des leviers affectifs en mettant en scène les enfants, l’avenir incertain, les familles, les amis, les enfants et notre histoire en sous-entendant qu’obéir aujourd’hui est signe de trahison pour nos ancêtres et notre histoire. Pour finir, dans l’inconscient collectif le lion à meilleur presse que le mouton, c’est la encore une forme de truisme métaphorique.

Pour finir, il est clairement exprimé dans ce texte qu’il est incohérent de faire confiance au gouvernement et aux medias… Sous entendue : vous devez me faire confiance à MOI.

Conclusion

« Liberté et responsabilité »

Afin de mieux comprendre en quoi la liberté, en société, ne peut que difficilement se concevoir uniquement à travers un prisme individuel, on peut se tourner vers Sartre, qui distingue deux types de liberté:

Une liberté d’indépendance qui consiste à agir dans l’ignorance volontaire des circonstances, et la liberté de responsabilité, qui assume toutes lescontraintes et conséquences de la situation.

Pour le philosophe, la liberté absolue va de pair avec la responsabilité absolue.

« C’est parce que l’homme est libre qu’il est responsable (…) nos actions et nos choix impactent les autres qui nous entourent, et c’est précisément parce que ces actions sont libres que nous devons répondre de leurs conséquences”

Si vous choisissez de vous engager dans un combat pour une idéologie, libre à vous, mais prenez le temps et le recul nécessaire pour en être totalement responsable.

Nos corps sont confinés, mais rien ne peut confiner notre esprit à condition de s’en informer ! Alors que nous traversons manifestement une privation de liberté qui nous empêche de sortir et de nous retrouver, je pense à cet autre confinement que nous vivons sans nous en apercevoir :

Le confinement de nos esprits critiques.

Les lois et les devoirs me paraissent essentiels dans une société afin de garantir la liberté individuelle mais également collective. L’individu doit en outre agir avec moralité et éthique en usant de sa raison et de son discernement pour ne pas nuire à son bonheur et à celui d’autrui. L’Homme ne pourra en outre être totalement libre comme l’affirmait Spinoza (déterminisme), bien qu’il soit pourtant condamné à l’être selon Sartre.

Les avis et réponses péremptoires me paraissent encore une fois stériles et primitifs face à des sujets aussi complexes qu’incertains.

Il ne faut pas oublier que l’on ne connaît, ne comprend, ne reconnaît jamais tout (en tout cas pour ma part) et il serait bon de faire « travailler la méconnaissance« .

Il faudra assurément puiser dans nos capacités de réflexion et se permettre d’explorer divers « états de conscience » afin de nous « déconfiner mentalement » de nous-mêmes et de nos préjugés.

« Dans notre exception culturelle occidentale, nous n’apprenons pas à explorer nos mondes intérieurs. Lorsqu’une enfant rêve, on le lui reproche. Lorsqu’il se dirige vers des activités artistiques, c’est souvent toléré comme un passe temps et rarement vu comme une activité sérieuse. Nous éduquons notre capacité de déduction, d’analyse, notre logique et notre mémoire. Mais éduquons-nous notre imaginaire ? Quels enseignements nous aident à développer notre créativité ou notre sensibilité ? Un enfant peut grandir et devenir adulte sans que jamais la question des états de conscience ne soit abordée. Même lorsque la méditation est tolérée à l’école, c’est pour « calmer » les enfants. Il s’agit de les rendre plus productifs en somme, et non de les aider à mieux se connaître ! Rien ne sensibilise, ne donne le goût d’explorer les univers qui existent en chacun de nous. Quand une personne se plonge dans une œuvre, on dit qu’elle s’évade.. mais de quoi s’évade-t-elle au juste ? Peut-être d’une profonde sensation d’enfermement ? Je crois que chacun finit par avoir l’intuition qu’il nous manque quelque chose d’essentiel dans notre civilisation. Quelques ersatz sont autorisés : télévision, jeux, alcool…  mais là encore, plus comme soupape, qu’avec une véritable intention d’éduquer notre esprit. Ce confinement de l’esprit, nous le vivons donc de façon insidieuse. C’est un confinement qui ne se dit pas, qui se conceptualise difficilement, car il manque à notre société des mots et des concepts pour le penser, le réaliser. Pourtant, quelques psychonautes ont ouverts la voie, chacun avec des outils différents  :  Aldous Huxley, William James, Timothy Leary, André Breton, Lewis Caroll, Milton Erickson… Eux et bien d’autres encore ont laissé des méthodes, des outils, des directions, que nous pouvons emprunter. D’autant que pour une fois dans notre histoire, les sciences modernes nous permettent de commencer à faire le tri entre superstitions et expériences tangibles… Ce confinement donc, il ne tient qu’à nous de le dépasser. » Kevin Finel (Hypnologue)

Sylvain Gammacurta Hypnose

Vidéo Intéressante sur le sujet : https://www.youtube.com/watch?v=BT-ZsfT2Sn8&feature=emb_title

Sources :

 D. Guillon-Legeay :Liberté et sécurité : l’onde de choc politique ?

Thomas Hobbes : Leviathan

Spinoza, Sartre, Finel…

Aristote : L’art de la rhétorique

Cynthia Fleury : les pathologie de la démocratie.

1 réflexion sur “Liberté vs sécurité”

  1. Patrick GAMMACURTA

    L’ analyse est excellente, l’argumentation permet de conforter l’opinion de la majorité des gens .
    Les informations sont solides et irréfutables.

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