Sylvain Gammacurta Hypnose
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Comprendre ses croyances

Tout d’abord, remarquons toute l’ambiguïté du verbe « croire ». Malgré l’intérêt probant de l’étude des croyances sur notre fonctionnement interne, ce domaine souffre d’un manque de clarté, de frontières floues et comme nous l’avons définie d’une conceptualisation sujette à des ambiguïtés sémantiques. Discuter des croyances est une tâche délicate. D’une part, cela peut heurter voire offenser certaines personnes et toucher à leur sensibilité, ce qui n’est absolument pas mon intention. D’autre part, les croyances sont par nature subjectives, souvent influencées par le contexte et parfois inconscientes. Aborder ce sujet nécessite donc une grande prudence et un profond respect pour la diversité des perspectives et des expériences individuelles. Il est essentiel de reconnaître que les croyances, qu’elles soient religieuses, culturelles ou personnelles, jouent un rôle fondamental et souvent utile dans la manière dont les individus perçoivent le monde et interagissent avec lui. En conséquence, toute discussion sur ce thème doit être menée avec ouverture d’esprit et empathie, en valorisant le dialogue et l’écoute attentive.

Contrairement aux objets physiques, les croyances ne peuvent pas être directement observées ou pointées du doigt dans le monde matériel. Leur compréhension peut varier en fonction des associations conscientes et/ou inconscientes que nous faisons avec leurs terminologies. Bien que certaines études en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) puissent montrer les régions du cerveau activées par des croyances, celles-ci restent conceptuellement difficiles à expliquer. Les croyances expriment généralement une conjecture plutôt qu’une conviction établie, mais ce n’est pas toujours le cas. Parfois, le doute inhérent à leur existence semble avoir totalement disparu.

Le sujet des croyances est à l’intersection de plusieurs disciplines : la philosophie, les neurosciences, la psychologie, et même la sociologie. Chaque discipline apporte son propre cadre conceptuel et son vocabulaire, ce qui peut parfois prêter à confusion. En philosophie, les croyances sont souvent explorées en termes de vérités subjectives et de justifications épistémiques. En neurosciences, elles sont examinées à travers l’activité cérébrale et les processus cognitifs (notamment une inhibition du gyrus frontal inférieur gauche pour les croyant face au sceptique). La psychologie, quant à elle, étudie les croyances en lien avec le comportement et les émotions.

Cette interdisciplinarité enrichit notre compréhension des croyances, mais elle complique également leur étude. Les termes et les concepts utilisés peuvent varier considérablement d’un domaine à l’autre, rendant difficile une compréhension unifiée et cohérente.

Les systèmes cognitifs et leurs influences sur les croyances

Nos croyances, qu’elles soient rationnelles ou irrationnelles, valides ou non, sont façonnées par deux systèmes cognitifs fondamentaux : le système intuitif et le système analytique. Le système intuitif est rapide, automatique et souvent basé sur des instincts ou des impressions immédiates. En revanche, le système analytique est lent, délibéré et nécessite une réflexion consciente. Selon notre contexte et notre état d’esprit, l’un de ces systèmes peut dominer l’autre, influençant ainsi notre perception et nos croyances.

Même les adultes éduqués et émotionnellement stables peuvent être sujets à des superstitions ou des croyances qu’ils savent irrationnelles. Parfois, l’adhésion à une croyance est seulement contextuelle, notamment lors de la traversé d’une période de stress ou de déséquilibre émotionnel. Les raisons qui nous font croire son multiples, elles interviennent souvent à notre insu et elles décernent à nos croyances une évidence et une clarté généralement difficile à remettre en cause. Les modèles à double processus, tels que celui proposé par Kahneman et Frederick, expliquent pourquoi cette forme de pensée est répandue. Ces modèles montrent comment certaines croyances superstitieuses émergent et pourquoi elles sont maintenues malgré leur fausseté.

==> « Système 1 / Système 2 : Les deux vitesses de la pensée » est la traduction de l’ouvrage « Thinking, Fast and Slow » de Daniel Kahneman, publié en 2011. Ce livre résume des décennies de recherches. La thèse centrale de l’ouvrage repose sur une dichotomie entre deux modes de pensée : le système 1, qui est rapide, instinctif et émotionnel (générateur de croyance magique par excellence), et le système 2, qui est plus lent, réfléchi et logique.

Pour en savoir plus sur ce livre : https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_1_/Syst%C3%A8me_2:_Les_deux_vitesses_de_la_pens%C3%A9e

La persistance des croyances irrationnelles : Le concept d' »acquiescence »

Avant d’être une croyance, c’est-à-dire, avant d’avoir cette caractéristique d’être étanche, réfractaire et résistante à toute remise en cause (définition de Thierry Ripoll), la croyance est généralement considérée comme une simple hypothèse. Comme toutes les hypothèses que nous générons au quotidien ou dans le milieu scientifique, nous pouvons analyser deux phases dans leur genèse. D’abord la phase d’élaboration, puis celle de confirmation ou d’infirmation. C’est là qu’une des spécificités de l’être humain entre en jeu.

Pour comprendre pourquoi les croyances irrationnelles persistent même lorsque les gens savent qu’elles ne sont pas vraies, il est nécessaire d’adapter les modèles à double processus. Selon Risen, ces modèles doivent découpler les processus de détection et de correction des erreurs. Cela signifie que les gens peuvent reconnaître, sur le moment, que leur croyance n’a pas de sens, mais la suivre quand même. Ce phénomène, appelé « acquiescence » (Risen 2016), explique comment les croyances superstitieuses peuvent se maintenir.

Article relatif : La force de nos bugs

https://cogsys.sites.olt.ubc.ca/files/2016/11/Risen-2016-superstition-acquienscence.pdf

Thierry Ripoll, dans ses études et son livre « Pourquoi croit-on ? Psychologie des croyances (2020), ainsi d’autres chercheurs ont montré que, bien que nous soyons tous, à des degrés divers, victimes de pensées magiques, certaines personnes le sont de manière spécifique et parfois extrême. Les psychologues parlent alors de troubles interprétatifs, caractérisés par une propension excessive à donner un sens à des événements ou des phénomènes qui n’en ont pas. Cela est particulièrement visible dans les symptômes d’idées de référence.

Les idées de référence sont un symptôme observé au cours de certaines affections psychiatriques correspondant à la croyance selon laquelle certains éléments de l’environnement posséderaient une signification personnelle et inhabituelle.

Un sujet manifestant de tels symptômes peut éprouver les impressions suivantes :

  • Les émissions de télévision parlent de lui ou s’adressent directement à lui.
  • Des personnes étrangères à son entourage lui laissent des signes ou parlent de lui derrière son dos.
  • Le moindre événement revête un sens particulier pour lui.
  • Des objets ou situations ont été conçus délibérément pour lui envoyer un message…

Sans parler de pathologie, il nous arrive à tous de faire des liens ou d’interpréter les situations, les actes ou les paroles de manières irrationnelles afin de faire coïncider la complexité de la vie et de nos relations avec nos convictions les plus profondes. Cela donne une impression de sens qui se renforce et se rigidifie grâce (ou à cause) à de nombreux biais cognitif.

L’Hypnose comme outil de modulation des croyances

L’hypnose peut agir sur certaines des croyances que l’on souhaite moduler en intervenant directement sur le système intuitif. L’état hypnotique, caractérisé par une attention focalisée et une réceptivité accrue aux suggestions, permet de contourner les mécanismes de défense du système analytique. Cela ouvre la voie à une reprogrammation cognitive où des croyances irrationnelles ou des comportements superstitieux peuvent être modifiés ou remplacés par des croyances plus rationnelles et des comportements plus adaptés.

Par exemple, une personne qui souffre d’idées de référence peut, sous hypnose, être amenée à revisiter et à recontextualiser ces idées, réduisant ainsi leur impact émotionnel et leur influence sur son comportement quotidien. L’hypnose permet également être utiliser afin de renforcer des schémas de pensée plus logiques et cohérents, contribuant ainsi à une diminution des croyances irrationnelles. Il est alors très important de faire ce travail avec un professionnel formé convenablement à toutes ces techniques car nos croyances sont souvent à l’origine d’une recherche de stabilité psychoaffective complexe qu’il est essentiel de respecter et moduler de manière éthique.

Conclusion

Comprendre les croyances, qu’elles soient rationnelles ou irrationnelles, nécessite une analyse approfondie et un profond respect des systèmes cognitifs et de leurs interactions. Les recherches en psychologie montrent que les croyances superstitieuses et les pensées magiques peuvent être expliquées par des modèles à double processus, mais aussi qu’il est essentiel de tenir compte des phénomènes d’acquiescence et des troubles interprétatifs pour saisir pleinement pourquoi certaines croyances persistent. En comprenant mieux ces mécanismes, nous pouvons espérer mieux gérer nos propres croyances et aider ceux qui sont affectés par des formes extrêmes de ces pensées. De plus, des techniques comme l’hypnose offrent des outils prometteurs pour moduler et reprogrammer des croyances irrationnelles, ouvrant ainsi la voie à une amélioration du bien-être mental et émotionnel. Car oui, même si nous avons en devoir éthique de tolérance, toutes les croyances ne se valent pas. En prônant l’idée que tout est croyance, que toutes les perspectives se valent, et que chacun est libre de croire en sa propre vérité, tout devient potentiellement sujet à contestation, et donc, à acceptation. Ce relativisme extrême peut sembler, au premier abord, être un signe de scepticisme nécessaire, un doute éclairé et réfléchi, ainsi qu’un profond respect des opinions d’autrui. Cependant, l’ironie de ce scepticisme généralisé contribue également à banaliser des croyances parfois extrêmes, voire délétères. En remettant tout en question, y compris des faits étayés par des preuves empiriques solides et des théories bien établies, le manque de discernement peut nous conduire à tolérer voire pire à adopter à notre tour n’importe quelles idées saugrenues. Il s’agit là d’un paradoxe surprenant : le doute et la contestation des faits et des théories les plus solides aboutissent souvent à l’avènement de dangereuses inepties, je vous invite donc à la plus grande des prudences sur ce sujet.

Sylvain Gammacurta

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